Né en novembre 1935 à Sceaux, près de Paris, Alain Delon passe les quatre premières années de sa vie enveloppé de l’amour inconditionnel de sa mère Édith. La jeune femme voue un culte à cet enfant dont la beauté lui vaut les remarques admiratives des passants. Mais l’année 1939 referme cette parenthèse idyllique. La Seconde Guerre mondiale éclate, en même temps que le mariage de ses parents. Le petit Alain est placé chez une nourrice à Fresnes, épouse d’un gardien de prison. Il y restera dix ans, ses parents ayant entre-temps refait leur vie et des enfants. La douleur de cet abandon brutal, Alain Delon la portera toute sa vie comme une plaie ouverte. L’enfant refoule son chagrin, apprivoise cette solitude, se forge un caractère rebelle. Renvoyé de plusieurs établissements scolaires, il fugue, enchaîne les larcins. Quand sa mère le récupère, l’adolescent décroche un CAP charcuterie, pour travailler avec son beau-père, boucher à Bourg-la-Reine. Au comptoir, il fait sensation. “Le môme désarmait les clientes rien qu’en les regardant. Il avait des yeux qui foudroyaient”, racontera fièrement Édith. Alain Delon ne sait pas encore que cette beauté sera son salut. Mais une chose est sûre : il ne sera pas charcutier. À 17 ans, il s’engage dans la Marine nationale, avant de partir pour l’Indochine. Le jeune homme revient de la guerre transformé, épris de discipline.
Le pouvoir de la beauté
À Paris, où il enchaîne les petits boulots, Alain Delon prend conscience de l’effet que sa gueule d’ange produit sur les femmes. Certaines l’aident à subsister. Les femmes… C’est grâce à elles que son destin va basculer. Sa bonne étoile s’appelle Michèle Cordoue. Elle le présente à son époux, le réalisateur Yves Allégret, qui recherche, pour son film Quand la femme s’en mêle, “un garçon un peu voyou sur les bords, et entre les bords aussi”, relatera l’acteur. Nous sommes en 1957. Sa beauté juvénile tape dans l’œil des cinéastes. Puis vient la déflagration Plein soleil, en 1960. C’est avec ce film de René Clément que naît le mythe Delon, tout juste 24 ans. Dans la peau d’un assassin qui usurpe l’identité de sa victime, l’acteur ensorcelle la caméra. Un regard ambigu, une beauté féline, et déjà la maturité de jeu des plus grands. Le monde entier tombe sous son charme vénéneux.